Apnée du sommeil, l’avis d’un pneumologue, le Pr. Jean-Louis RACINEUX

Tiré de l’interview du Professeur Jean-Louis RACINEUX sur Doctissimo (avec son aimable autorisation), source : https://www.doctissimo.fr/html/psychologie/bien_dormir/ps_8050_apnees_sommeil_ronfleurs_itw.htm

Les apnées du sommeil sont plus fréquentes qu’on ne le pense !  4 à 8% de la population serait concernée. Et ces arrêts respiratoires nocturnes sont une véritable menace pour la santé. Le Pr. Jean-Louis RACINEUX, responsable du département de pneumologie au CHU d’Angers, fait le point pour Doctissimo sur cette maladie qui frappe dès la tombée de la nuit.

L’apnée du sommeil n’est pas un problème à négliger. Ce trouble se traduit par des courts arrêts respiratoires durant la nuit. A long terme, la mauvaise oxygénation de l’organisme entraîne des troubles cardiaques, de l’hypertension artérielle et même des risques d’infarctus. Dépistage traitement… Le Pr. Jean-Louis RACINEUX répond à nos questions.

Les apnées du sommeil sont-elles aujourd’hui mieux dépistées ?

Pr. RACINEUX : Le nombre de consultations pour les apnées du sommeil augmente régulièrement depuis quelques années. Car le public est mieux informé et ce trouble mieux diagnostiqué par les médecins. Mais il y a encore de nombreux malades qui s’ignorent. On estime que 4% de la population souffrent de ce syndrome mais le chiffre exact serait plus proche de 8%. Les apnées touchent autant de monde que des maladies chroniques tel que l’asthme ou le diabète ! Il faut donc encore renforcer l’information du public et former les médecins généralistes à l’identification des symptômes. De même, il faut donner plus de moyens humains et matériels aux services de pneumologie aujourd’hui totalement surchargés. Car c’est à l’hôpital que se fera le diagnostic après une nuit complète d’enregistrement du sommeil.

Quel sont les signes qui permettent au médecin de détecter ce problème ?

Pour schématiser, si vous êtes un « ronfleur fatigué », vous avez toutes les chances de faire des apnées du sommeil sans le savoir. D’autant plus si votre conjoint constate des arrêts de votre respiration durant la nuit. Bien sûr il faut éliminer d’autres causes possibles de la fatigue en consultant son médecin. Mais le fait de ronfler associé à un sommeil non réparateur sont des signes qui doivent faire penser à des apnées du sommeil.

Les traitements ont-ils évolué ?

Le traitement de référence consiste à porter toute la nuit un masque relié à un appareil de pression positive continue, en fait un petit compresseur qui envoie de l’air sous pression. Ce procédé est le plus souvent efficace mais de nombreux patients ont du mal à gérer ce dispositif contraignant.

Un autre traitement plus récent est efficace dans environ 60% des cas : ce sont les orthèses d’avancée mandibulaire. Ce système qui s’apparente à un appareil dentaire est placé dans la bouche, il permet d’avancer la mâchoire et de dégager le pharynx pour laisser passer l’air.

Les traitements sur le voile du palais en revanche ne sont pas efficaces sur les apnées du sommeil. Ils peuvent éventuellement apporter un bénéfice sur le ronflement.

Les problèmes de suivi du traitement sont-ils aussi nombreux ?

Comme dans toute maladie chronique, le suivi du traitement est problématique. En moyenne, 20 à 25% des patients refusent d’emblée le traitement et 20% l’adaptent de manière imparfaite, le rendant inefficace. Ce qui signifie que près de la moitié des patients diagnostiqués sont non traités…  Il est donc important de proposer une approche personnalisée en fonction de ce que le malade est prêt à faire. L’éducation thérapeutique est essentielle, elle doit permettre de comprendre et de gérer son apnée du sommeil.

On met souvent en cause les problèmes de poids dans les apnées. Pouvez-vous  nous en dire plus ?

Dans 70% des syndromes d’apnées obstructives du sommeil, on retrouve un problème de surpoids et dans 50% des cas du diabète. La prise en charge diététique est donc essentielle. Si l’on améliore le problème de poids on diminue généralement la gravité du syndrome apnéique. A tel point que dans certains cas le trouble disparaît. Il faut savoir que ce surpoids augmente les risques cardiovasculaires, eux-mêmes déjà majorés par les apnées du sommeil. Il est donc essentiel d’intervenir sur les deux tableaux.

Vous coordonnez les journées apnées du sommeil organisées par les associations de malades et ouvertes au public. Quel est le but de ces journées ?

Ces journées permettent d’offrir aux malades et au grand public de nombreuses informations. Et une meilleure compréhension permet aux patients de mieux suivre et négocier leur traitement. Il faut développer les capacités des malades à gérer leur pathologie.