Un an et deux jours
Le 22 décembre 2019 … le 24 décembre 2020
Un an et deux jours différents, deux hospitalisations en soins intensifs respiratoires au CHU Nord (Saint-Herblain). Le 24 décembre 2020 à 22h30 un médecin des soins intensifs : « … Il est possible que votre mari ne passe pas la nuit…, est-ce le numéro de téléphone où l’on peut vous joindre, en cas d’urgence… » Ce ne sont peut être pas les mots exactement employés mais le sens est le même. Je ne peux même pas imaginer le ressenti, la souffrance de ma femme à cet instant, ni des enfants, gendres et petites filles en ce soir de réveillon. Elle demande à venir me voir, on lui répond que non en cause : les consignes sanitaires mises en place pour le Coronavirus.
Une personne vient me voir et me demande si je n’ai rien changé à mes « directives anticipées », suite à l’hospitalisation de décembre 2019, je réponds que non, je ne veux pas être intubé. Je ne comprends pas pourquoi on me demande cela, je ne comprends pas très bien la nécessité de la chose. Et pourtant la grande faucheuse est passée m’a laissé sur le bord de la route, mais elle a laissé derrière elle un vent de panique : la peur de mourir.
… « Je regarde autour de moi, il me semble voir sept personnes, deux médecins deux internes, deux infirmières, une aide soignante, celle-ci est prêt de moi, me tient la main, me parle… »
Moi, je veux partir, je veux partir dehors, respirer… Deux doses de morphines et je redescends un peu sur terre.
Plusieurs semaines après, je fais arrêt sur image. Est-ce la vérité ? ou une illusion de mon esprit, ces personnes autour de moi. Je ne sais pas, mais cette image me revient souvent.
Je ne me souviens plus d’être parti de chez moi en ambulance au service des urgences (pour les connaisseurs : saturation 63)… Je reprends mes esprits le 26 ou 27 décembre aucun souvenir de la venue de ma femme le 25 décembre, jour de Noël.
Merci à vous si vous étiez à ce 24 décembre et qui m’avez ramené à la surface. Merci aussi à ceux qui étaient là, le 25 décembre lorsque j’ai eu une crise en fin d’après-midi et une autre en début de soirée dont je ne me souviens pas. Merci madame, l’aide soignante, dont je ne connais pas le nom et qui anonymement, comme des milliers de soignants aident les gens comme moi à passer ces étapes difficiles et paniquantes de la vie. Merci de m’avoir soutenu, parlé, tenu la main. Merci d’avoir été là, alors que moi je voulais partir, partir dehors « respirer ». J’ai une reconnaissance sans limite envers vous.
Je ne suis pas le seul à être passé par ce service de soins intensifs mais peut être que vous vous rappellerez, c’était le 24 décembre 2020.
La panique de mourir, s’il y a quelque chose que je ne peux pas expliquer, c’est bien cela. C’est tellement envahissant, paniquant, terrifiant, qu’il m’est impossible de la définir avec des mots. Certains parlent de sérénité, comment fait-on ? Décédé dans la sérénité ? Moi je ne sais pas. Ces personnes ont sans doute trouvé un aboutissement à leur existence ou un départ éternel.
Il y a 30 ou 40 ans je disais que je n’avais pas peur de la mort cela me paraissait bien loin devant moi, mais ce 24 décembre elle était là… La grande faucheuse est passée, m’a laissé sur le bord de la route… Mais elle a laissé derrière elle un vent de panique…
Roland D
Janvier 2021